« Short cuts » est une référence plus ou moins directe au fameux « Commercial album » de The Residents (1980). A l’image du mythique groupe américain, Brain Damage développe ici une réflexion sur l’urgence, la frustration et l’intensité : tout devra être dit en un minimum de temps. Pour cela, aucun des 24 titres de ce projet ne dépassera la durée de deux minutes.
Une orientation pour le moins atypique pour ce groupe, toujours estampillé electro-dub, même si la palette de styles représentés ici s’est encore élargie par rapport aux albums précédents. On passe progressivement d?un folk psychédélique « floydien », à une sorte d’électro-techno minimale, via un trip- hop énigmatique, sans oublier le dub digital qui a contribué à faire la réputation du duo lors des deux premiers albums.
Si une fois de plus, pour ce quatrième album, nous retrouvons Brain Damage là où on ne l’attendait pas, certains choix restent néanmoins constants, comme celui de préserver le côté cérébral et ambient des expérimentations studio, en opposition à l’énergie brute et sensorielle dégagée en concert. Sur scène, les morceaux volontairement amputés de ce projet-zapping, seront plus amplement développés dans le temps…
Une nouvelle fois, Brain Damage s’entoure d’une pléiade d’invités, intervenants vocaux. Le « spoken word » y tient une place prépondérante, décliné ici en sept langues : français, anglais, bosnien, catalan, polonais, arabe et allemand. On retrouve évidemment Black Sifichi, invité permanent, accompagné du Real Fake MC, déjà présent sur l’album « Wave digger » de High Tone, Mohammed El Amraoui (Maroc) et Giovanni Marks (USA), déjà présents sur « Spoken Dub Manifesto », ainsi que des artistes rencontrés par le duo lors de ses récentes tournées dans les pays de l’est : Priest Maken (Joint Venture Sound System – Pologne), ou encore Asmir Sabic (Vuneny – Bosnie). On remarque également la présence d’Angeline Bouille, chanteuse lyrique aux multiples facettes, ainsi qu’une étonnante fraicheur apportée par Lamija, fillette de 6 ans, native de Sarajevo. Enfin, pour la première fois sur un album de Brain Damage, la langue francaise est représentée, grâce à la présence de Mika, chanteur de l’étonnant groupe Pusse, pour un texte ravageur non dénué d’humour, sous forme de manifeste, en toute fin d’album.